Les différents statuts juridiques des aires marines protégées
Parmi les aires marines protégées des côtes françaises de la Méditerranée (se référant à notre définition) donc reconnues ainsi ou non par la loi (loi n°2006-436 du 14 avril 2006 – Journal officiel du 15 avril 2006), on dénombre sept statuts juridiques. Toutes les zones marines protégées ayant un de ces statuts sont considérées dans la base de données MEDAMP
Les cantonnements de pêche
Les concessions
Les réserves naturelles
Les parcs nationaux
Les parcs naturels marins
Les zones Natura 2000
Les zones concernées par un arrêté de Biotope
Cas particuliers
Les cantonnements de pêche
Ce sont des zones marines concédées et cogérées par les délégations départementales des territoires et de la mer (les DDTE - ex "Affaires Maritimes") et des prud'homies de pêche. Ces cantonnements existent en Méditerranée depuis les années 1970. En 2016 quatorze cantonnements sont en place : huit en Corse, deux dans le Var, trois dans les Bouches-du-Rhône et un dans l’Hérault. Ils ne sont pas considérés par l'Etat comme des aires marines protégées alors que la protection juridique est la plus élevée (toutes formes de pêche interdites avec des exceptions marginales pour les cantonnements de Bonifacio et de Porto-Vecchio en Corse).
Dans ces zones marines, la plongée et le mouillage sont également interdits. Tous les cantonnements des côtes continentales sont balisés en mer, aucun cantonnement n’est balisé en Corse. Deux cantonnements sont enrichis de récifs artificiels (Carry le Rouet et Cap Couronne).
Pour la concession et les deux cantonnements de la Côte Bleue (Bouches-du-Rhône) une dénomination spécifique existe : le "parc marin de la côte bleue", nom du syndicat mixte qui gère l'ensemble.
La plupart des cantonnements doivent être renouvelés ou reconduits par des arrêtés ministériels (à intervalles très variables : tous les 1 à 10 ans en général). Depuis 2015 deux cantonnements ont un statut pérenne (pas de date de renouvellement indiqué dans le dernier arrêté concernant les cantonnements de Carry-le-Rouet et de Cap Couronne). Le dernier cantonnement a été créé en 2016 (celui de Porquières, devant Palavas-les-Flots) par un arrêté ministériel (ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, en charge des relations internationales).
Ces zones sont qualifiées communément comme étant des "réserves de pêche" (dans le sens de zones exclues à toute forme de pêche pour tous).
Les concessions
Ce sont des zones marines concédées et cogérées par les délégations départementales des territoires et de la mer (les DDTM - ex "Affaires Maritimes"), des prud'homies de pêche, des Conseils départementaux, des communes ou un syndicat mixte. Elles étaient qualifiées il y a peu de temps d’ "établissements de pêche" désignation paradoxale pour désigner un lieu où toute forme de pêche est interdite. Elles concernent quatre zones situées dans les Alpes-Maritimes et deux dans les Bouches-du-Rhône. Bien que qualifiées parfois de « réserves de pêche » dans certains arrêtés préfectoraux ou ministériels instituant les interdictions de pêche, leurs statuts et dénominations sont relatifs au titre domanial d'occupation du domaine public maritime. Ces qualificatifs descripteurs changent au gré des arrêtés. L’énoncé suivant de « concession des cultures marines concédées par l'Etat au département et au comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins » leur avait été attribué alors qu'aucun établissement d'aquaculture ou de conchyliculture ne s'y trouvait. Ce statut a été changé en « concession d'endigage et d'utilisation du domaine public maritime maintenue dans ce domaine en dehors des ports» alors qu’elles n’étaient liées à aucun projet d’endigage. Pour la concession créée en 2004 à Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes) un autre statut a été institué : celui de « concession relative à l'utilisation des dépendances du domaine public maritime ».
Dans ces zones marines, toute forme de pêche est interdite par arrêté ministériel ; la plongée et le mouillage sont interdits par arrêté préfectoral (préfecture maritime). Elles sont toutes balisées et enrichies de récifs artificiels, mais elles ne sont pas reconnues comme étant des aires marines protégées par la loi.
Pourtant dans les trois derniers arrêtés préfectoraux de renouvellement de concessions des Alpes-Maritimes leur titre indique clairement que ces zones sont « protégées ».
Pour la concession entourant les deux cantonnements de la Côte Bleue (Bouches-du-Rhône) une dénomination spécifique existe : le "parc marin de la côte bleue", nom du syndicat mixte qui gère l'ensemble.
Le statut de ces concessions n'est pas pérenne : les arrêtés doivent être renouvelés ou reconduits (tous les 1 à 15 ans en général).
Les réserves naturelles
Une est située à Cerbère Banyuls (Pyrénées-Orientales) et deux autres en Corse : celle de Scandola (gérée par le parc naturel régional de Corse) et celle des Bouches de Bonifacio (gérée par l'office de l'environnement de la Corse). Elles sont reconnues par l'Etat comme étant des aires marines protégées mais qualifiées par les utilisateurs (en langage courant) de réserves naturelles.
Pour la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio, les interdictions et la règlementation (excluant des catégories de pêcheurs) concernent surtout des espaces localisés (falaises de Bonifacio et parages, autour des îles Cerbicale, Lavezzu, Bruzzi et Les Moines). Ces zones règlementées et surveillées sont englobées dans une zone très étendue, sans interdiction d’une catégorie de pêcheurs mais avec quelques contraintes (pêche de loisir soumise à autorisation avec limitation du nombre de prises ou de leurs poids, limitation du nombre de lignes ou cannes par bateau, …). Ces zones à règlementation faible sont considérées dans le calcul de la surface des aires marines protégées par la loi.
Leur statut est pérenne. Par contre les niveaux de protection de certaines sous-zones peuvent changer dans le temps.
Un accord international avec l'Italie a été signé rapprochant le parc national (italien) de l'archipel de la Maddalena (situé au nord de la Sardaigne) de la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio. Le qualificatif de "parc marin international des Bouches de Bonifacio" est ainsi utilisé pour décrire l’ensemble.
Les réserves naturelles sont dotées d’un comité scientifique spécifique (des scientifiques bénévoles). Cependant, pour Scandola le comité scientifique a été dissous en 2016. Quelques scientifiques spécialistes du milieu marin ont été inclus dans le comité scientifique qui conseille la gestion de l’ensemble du parc régional de Corse dont dépend la réserve naturelle de Scandola.
Les parcs nationaux
Au nombre de deux (Port-Cros et Calanques), ils ont une bordure littorale terrestre avec un espace marin. Leurs parties marines sont reconnues par la loi comme étant des aires marines protégées. Ces parcs nationaux ont des zones localisées et restreintes protégées juridiquement pour exclure certaines catégories de pêcheurs (professionnels, de loisir à la ligne ou chasse sous-marine) et des zones bien plus vastes dont la réglementation est ou sera définie par les chartes des parcs dans une perspective de développement durable. La pêche, dans ces dernières zones très étendues, est autorisée à tous avec quelques contraintes (pêche de loisir soumise à autorisation avec limitation du nombre de prises ou de leurs poids, limitation du nombre de ligne ou cannes par bateau, interdiction de certains moyens très spécifiques comme les chaluts ou ganguis et les moulinets électriques …). Ces zones à règlementations faibles sont considérées dans le calcul de la surface des aires marines protégées par la loi.
Leur statut est pérenne. Par contre les niveaux de protection et d’interdictions pour des sous-zones peuvent changer dans le temps.
Les Parcs nationaux sont dotés d’un comité scientifique spécifique (des scientifiques bénévoles).
Les parcs naturels marins
On en dénombre deux : celui du Golfe du Lion et celui du Cap Corse et de l’Agriate (créé en 2016). Aucune interdiction spécifique de prélèvement ne concerne ces vastes zones. Ces zones sont pourtant considérées comme étant des aires marines protégées par la loi. Elles s’étendent bien au-delà des eaux territoriales (12 milles marins - soit 22,224 km - des côtes) sur une partie de la zone économique exclusive (qui s’étend jusqu’à 200 milles marins des côtes).
Les sites Natura 2000
L'expression Natura 2000 en mer désigne la partie marine du réseau européen Natura 2000 que les états-membres de l'Europe ayant une façade maritime ou des territoires outre-mer devaient mettre en place dans le cadre de la Directive habitats, avant la mi-2008. Natura 2000 en mer a pour objectif de restaurer et/ou maintenir la diversité biologique de ces milieux, tout en tenant compte des exigences économiques, sociales, culturelles et régionales dans une logique de développement durable (de la pêche notamment).
La mise en place de ces sites et leur gestion est très structurée et harmonisée.
Une fois le tracé d’un site défini par l’Etat, il est proposé à la commission Européenne avec la liste des habitats référencés et la liste des espéces d’intérét communautaire que les gestionnaires devront protéger. C’est l’étape de proposition du site d’intérêt communautaire (pSIC).
La commission européenne entérine cette proposition : le site est intégré dans la liste des sites d’importance communautaire (SIC) pour la région biogéographique méditerranéenne. C’est ensuite un arrété ministériel qui érige ce site en zone spéciale de conservation (ZSP). Dans cet arrêté, la site géographique du site est définie ainsi que les habitats et espèces justifiant la création du site.
Un comité de pilotage est créé (COPIL). Il est composé de 50 à 90 membres représentant représentants les colléges de l’Etat et de ses établissements, des collectivités territoriales et leurs groupements, des institutions, organismes et professions liées à la mer et au littoral, des usagers, des associations et organismes œuvrant sur le périmétre du site dans le domaine culturel, environnemental ou sportif. Il a la charge de rédiger des documents d’objectifs et de suivre les directives de gestion des documents établis.
Les documents d’objectifs (DOCOB) se déclinent en plusieurs parties :
- diagnostics, enjeux et objectifs de conservation,
- objectifs de gestion et préconisation de mesures,
- note de synthèse et charte entre les divers partenaires.
Ces documents doivent être validés par le comité de pilotage puis approuvés par un arrêté interpréfectoral (préfet maritime et préfet du département ou de la région).
Toutes ces étapes sont décrites dans nos fiches descriptives des 36 sites Natura 2000 (volet « inventaire »).
On dénombre 36 sites Natura 2000 en mer dont 19 s’étendent à la fois en mer et sur terre. Nous n’avons retenu que les sites Natura 2000 en mer de la directive européenne « habitat, faune, flore »). Aucune interdiction spécifique de prélèvement ne concerne ces zones très étendues. Pourtant, elles sont toutes considérées comme étant des aires marines protégées par la loi. Ni les utilisateurs de la mer, ni les collectivités territoriales ne les qualifient de "réserves marines".
Nous soulignons le fait que toutes les espèces visées par les objectifs de protection des 36 sites Natura 2000 (les posidonies, les dauphins, les tortues …) sont des espèces strictement protégées dans toutes les eaux territoriales françaises par des lois françaises et des conventions internationales. La protection globale et efficace de ces espèces « prioritaires » doit rester uniforme quel que soit le périmètre géographique où elles se trouvent.
Sur les 36 sites Natura 2000 en mer de la directive habitats - faune - flore, 26 sont couvertes par des aires marines mieux protégées ou gérées. La gestion de ces zones Natura 2000 couvertes est, pour certaines, prise en charge par les gestionnaires des aires superposées.
Par ailleurs, un même périmètre marin a été divisé en plusieurs zones Natura 2000 contigües, chacune dotée d’une pléthore d’administrateurs distincts dans les “comités de pilotage” (jusqu’à 90 membres convoqués à chaque réunion).
La co-gestion de ces sites (par l’Etat, les collectivités territoriales, les utilisateurs de la mer, … ) dépend essentiellement de l’implication ou non des collectivités territoriales locales. L’Agence pour la Biodiversité - avant 2017 agence des aires marines protégées – est le « référent technique » de toutes ces zones.
Les zones concernées par un arrêté de biotope
Un seul arrêté de biotope concernant le milieu marin en Méditerranée a été retenu dans MEDAMP : il délimite à la fois l'archipel des Bruzzi et les îlots des Moines (Corse-du-Sud). Cet arrêté interdit la pêche de loisir (à la ligne et chasse sous-marine). Ces deux zones sont maintenant intégrées dans la réserve naturelle des Bouches de Bonifacio : des zones à réglementation plus forte se superposent aux deux zones protégées par l’arrêté de biotope. L'Etat considère ces zones comme faisant partie des aires marines protégées.
Cas particulier : la zone d'arrêté de protection de biotope "Pointe de Beauduc" située à cheval sur la terre et sur la mer vers la pointe de Beauduc devant le parc naturel Régional de Camargue (Bouches du Rhône).
Un arrêté préfectoral (du 30 septembre 2013) institue cette zone de protection de biotope. Elle englobe un espace marin mais est plus spécifique à la partie terrestre (c'est dans l'intitulé de l'arrêté).
Un arrêté ministériel, pris deux années plus tard (15 juillet 2015), vise les cinq espèces marines (sur les 28 de l'arrêté) identiques à celles de l'arrêté préfectoral de 2013. Comme pour l'arrêté préfectoral de 2013, cet arrêté ministériel n'interdit qu'une forme de pêche : la pêche à pied (donc seule une bande marine très étroite est concernée et pas toute la zone marine définie par l'arrêté). De facto, la pêche de loisir à la ligne et la pêche professionnelle restent autorisées à bord d'une embarcation et la chasse sous-marine n'est pas interdite.
Pour renforcer la règlementation dans la partie marine, un autre arrêté préfectoral a été pris deux mois après l'arrêté ministériel (le 11 septembre 2015). Cet arrêté interdit le mouillage des navires et engins immatriculés, ce qui protège des ancres les herbiers de zostères (de même que les nacres et les ruppia). Considérant que l'arrêté de biotope actuel est essentiellement terrestre et qu'aucune mesure de protection contre les prélèvements en mer y est associée (sauf la pêche à pied) - nous n'avons pas tenu compte de cette zone dans l'inventaire actuel. Dans une amélioration de ce site nous intègrerons ce cas particulier dans une catégorie où sera classée aussi les zones marines situées au droit de certains terrains du conservatoire du littoral dont les gestionnaires ont obtenu une compétence sur le sol marin, le fond et ainsi les biocénoses et écosystèmes situés sur le fond (benthiques) ; mais pas la colonne d’eau.
Cas particuliers
La Loi du 27 février 2002 a clarifié la possibilité d’intervention du Conservatoire du littoral (Art. L322-6 du code de l’environnement) sur le Domaine public maritime (DPM). Le Conservatoire du littoral mène une stratégie d’intervention sur le domaine public maritime, validée par l’Etat et variable dans chaque région. Depuis certains gestionnaires des terrains du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres ont obtenu une compétence sur le domaine maritime situé devant leurs terrains (terrestres). Cette compétence concerne le sol marin, le fond et ainsi les biocénoses et écosystèmes situés sur le fond (benthiques) ; pas la colonne d’eau.
http://www.aires-marines.fr/Les-aires-marines-protegees/Categories-d-aires-marines-protegees/Domaine-public-maritime-du-Conservatoire-du-Littoral
Des conventions attribuent ainsi certaines zones marines à des gestionnaires de terrains littoraux. Ces zones conventionnées sont considérées par l’Etat comme étant des aires marines protégées. Bien qu’il n’y ait aucune réglementation spécifique pour la pêche ou le mouillage des bateaux, le linéaire du littoral et les écosystèmes benthiques sont ainsi gérés et le trait de côte protégé de tout aménagement gagné sur la mer pour la durée des conventions (30 années).
Dans cette base de données nous n’avons pas saisi les données relatives à ces espaces particuliers, gérés et protégés par des gestionnaires de terrains du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres. Il est envisagé de les intégrer dans une prochaine refonte de ce site.
Le sanctuaire international (Pelagos) concerne un large périmètre international (87 500 km²) protégeant uniquement les mammifères marins. Au niveau international, il n’est pas considéré dans l’inventaire des zones marines protégées (la protection doit concerner l’ensemble des espèces halieutiques ou l’ensemble de la biodiversité d’une zone définie https://cmsdata.iucn.org/downloads/iucn_categoriesmpa_eng.pdf).